Pascal Gendry : « Les MSP ont besoin de nouveaux moyens »
Installé en Mayenne, à Renazé (53), à 40 km de Laval, en maison de santé pluriprofessionnelle depuis 2009, Pascal Gendry, 51 ans, est président de la Fédération Française des Maisons et Pôles de Santé depuis décembre dernier. A la veille de l’ouverture des 6è Journées Nationales de la FFMPS, il s’explique sur les atouts et les problèmes rencontrés par ce modèle de référence que sont désormais les MSP.
Quel état des lieux des MSP dressez-vous à la veille de vos Journées de Lyon ?
Nous sommes actuellement 1000 maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP) installées dans tout l’Hexagone. Leur nombre continue d’augmenter régulièrement avec quelques disparités géographiques et une grosse prédominance en zone rurale et en ville moyenne. Mais aussi avec des difficultés en zone urbaine, notamment en centre-ville, liées à l’identification des équipes d’intervenants et surtout au prix de l’immobilier. La moyenne des professionnels de santé engagés par maison de santé est de 15, ce qui nous amène à 15 000 PS opérant à ce jour en MSP, dont 5000 médecins généralistes. Nous sommes environ 15 % de professionnels en exercice regroupés. Nous observons un doublement du nombre de MSP en 3-4 ans. Il faut passer à présent d’une époque des leaders et des militants de la formule à une autre époque de consolidation et de développement.
La progression enregistrée des MSP en France est-elle la traduction d'une formule qui séduit et fait recette notamment dans les rangs des jeunes médecins ?
Il ne faut pas se cantonner aux seules nouvelles générations de médecins, mais parler aussi des plus anciens qui ont besoin de se coordonner dans l’exercice de leur métier. Les soins sont de plus en plus complexes, avec des patients qui sortent de plus en plus vite de l’hôpital, qui ont des pathologies chroniques. Mais les médecins veulent aussi travailler autrement en faisant des soins primaires du 21e siècle, dans les murs mais aussi hors des murs.
Jusqu'où pensez-vous que le modèle MSP puisse aller ? 30 % des PS installés ? L’obstacle ne demeure-t-il pas l’individualisme de certains médecins qui veulent être maître de leur pratique ?
30 % est au moins un objectif et pas seulement dans les zones désertées par les médecins, comme on l’entend dans la campagne pour la présidentielle actuellement. Nous avons sans doute une révolution à opérer dans les esprits. Certains l’ont déjà faite. D’autres professionnels libéraux se sont regroupés pour faire face aux défis de leur profession. Je pense par exemple aux avocats. Nous avons aussi ces défis à relever.
Les candidats à la présidentielle retiennent tous - ou presque - les maisons et pôles de santé pluriprofessionnels comme solution clé pour résoudre les problèmes de désertification médicale ? Est-ce vraiment la bonne et unique réponse ?
Ce n’est certainement pas l’unique solution. C’est une solution. Elle est intéressante car elle couvre à la fois les besoins des professionnels installés ou en voie d’installation et les besoins nouveaux de la population. Cela reste une option. Ce n’est pas le fait de construire des murs qui va solutionner les problèmes auxquels nous devons faire face. Il faut aussi que les professionnels fassent vivre et évoluer leur projet de santé.
Quelle est la bonne formule ? Faire en « tout libéral », sur fonds propres, ou s’adosser à des structures publiques avec des financements publics ?
Il faut être pragmatique. IL n’y a pas de modèle unique de MSP. Il faut considérer le territoire, les organisations professionnelles en place, les organisations territoriales, de maintien à domicile etc. le plus pertinent est peut-être d’être totalement autonome, ou d’être adossé à une structure médico-sociale ou à un hôpital. Il n’y a pas de modèle unique. Il faut faire confiance à l’innovation et à l’analyse des professionnels sur ce qui est pertinent pour leur territoire
Qu'attendez-vous du futur gouvernement qui sortira des urnes cette année pour faciliter votre travail dans les MSP ?
Il faut qu’il nous aide à mieux structurer nos équipes. L’aide au fonctionnement est encore très relative. Des équipes fonctionnent encore avec leur bonne volonté et leurs compétences locales. A 15 ou 20 professionnels sous un même toit, il faut des compétences nouvelles, que le seul paiement à l’acte ne peut pas financer. Cela veut dire des professionnels dédiés à la coordination des équipes. Cela impose des moyens nouveaux pour que ces équipes puissent fonctionner et répondre aux besoins de la population, à de nouvelles formes de prise en charge.
Nous sommes passés d’un modèle expérimental qui bénéficie à 250 équipes à un règlement arbitral, faute d’accord conventionnel, qui profite à 400 équipes. Mais ces fonds sont d’un niveau insuffisant pour assurer des fonctions de coordination, l’utilisation optimum d’un système d’information ou encore pour produire et analyser des données pour ajuster les prises en charge des populations. Pour l’instant, nous sommes encore aux balbutiements des aides qui sont nécessaires pour faire fonctionner nos structures. Notre modèle économique existe et nous sommes convaincus qu’il va produire des économies dans l’organisation des soins primaires.
Propos recueillis par J-J Cristofari
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